Evaluation de la pierrosité : Différence entre versions
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Version du 31 janvier 2013 à 14:26
D’un côté, les sols caillouteux représentent environ 40% des sols français. D’un autre côté, les analyses de sols en laboratoire s’effectuent normativement sur la terre fine (1) (c’est-à-dire sur les particules inférieures à 2mm , après préparation et broyage selon les normes NF X 31-101 et NF EN ISO 11464), et ignorent ces pierres, graviers et autres cailloux fantômes. Néanmoins, comme la profondeur de sol utile ou la nature du sous-sol, la connaissance de la pierrosité d’une parcelle est indispensable au conseiller pour interpréter et utiliser l’analyse. Intuitivement, on peut penser que, par exemple, un sol ayant 50% en volume d’éléments grossiers (supérieurs à 2mm) a un potentiel minéral et nutritif équivalent à un sol non caillouteux moitié moins profond. Pratiquement, l’approche est plus complexe, la présence de cailloux modifiant et, parfois, améliorant le fonctionnement du sol. Partant dans un premier temps des outils d’appréciation de la charge en cailloux, l’Agro Reporter va s’intéresser aux effets négatifs ou positifs de la pierrosité sur les sols et les plantes.
Sommaire
Pourquoi étudier les éléments grossiers d’un sol ?
Dès que leur présence dans un sol est significative, les éléments grossiers vont avoir des effets agronomiques qu’il faudra prendre en compte :
- diminution de la réserve utile en eau du sol ou, au contraire, stockage d’eau,
- protection contre l’évapotranspiration,
- stockage d’énergie et réchauffement du sol,
- obstacle au développement racinaire,
- évolution plus rapide des matières organiques,
- maintien de la porosité du sol et protection contre le tassement…
Techniquement, une charge trop importante en cailloux va entraîner des difficultés de semis et de récolte, elle va être un obstacle à la mécanisation et pour certaines cultures, obliger à un choix de matériel spécifique ou de méthodes culturales appropriées.
Appréciation de la pierrosité
Plusieurs méthodes ont été décrites pour apprécier la pierrosité globale d’un sol, en volume ou en masse.
• La pesée au champ : cette méthode laborieuse consiste, à l’aide de tamis et de balance, et selon un plan statistique précis, à peser les éléments grossiers du sol et à ramener leur masse au poids total de la terre.
• La pesée des refus au laboratoire : cette mesure, qui consiste à peser les particules supérieures à 2mm de l’échantillon, se fait le plus souvent sur demande explicite et doit être complétée par l’estimation (en masse) des éléments les plus volumineux non prélevés. Il paraît nécessaire d’avoir cette information, invariante, au moins une fois dans l’historique analytique d’une parcelle. La seule connaissance des refus est déjà une information importante (surtout s’ils sont élevés) mais n’est pas suffisante en soi pour apprécier la pierrosité, dans la mesure où la répartition des cailloux ne suit pas forcément une loi statistique normale.
• Le comptage par points : on compte le nombre d’éléments grossiers à l’aide de grilles (proches de celles utilisées pour un comptage floristique) et on mesure leur taille. Il existe, là aussi, des méthodes statistiques spécifiques. On est ici sur une approche en volume.
• L’estimation visuelle : cette méthode, la plus fréquente, utilise des grilles d’estimation de la pierrosité du sol (identiques à celles utilisées pour l’appréciation de la couleur). On est là, également, sur une approche en volume. Ces grilles sont utilisables pour une étude de surface ou de profondeur (profil cultural). Sur le graphique ci-dessous chaque quart de carré a la même proportion, en surface, de cailloux mais pas le même nombre. L’appréciation de la taille des éléments grossiers est donc également importante pour le comportement du sol et des racines.
En volume, expression recommandée par le GEPPA (Groupe d’Etude des Problèmes de Pédologie Appliquée), la quantité d’éléments grossiers est généralement décrite de la façon suivante :
Cette information doit être complétée par une estimation de la taille des éléments grossiers, pour des conseils de mécanisation, par exemple. Plusieurs classifications existent. La plus courante (AFNOR X 31-003 1998) utilise la grille suivante :
Dans l’étude du profil d’un sol, la description de la quantité et de la taille des éléments grossiers est effectuée pour chaque horizon. Deux sols identiques sur les 40 premiers centimètres n’auront en effet pas le même comportement s’ils reposent l’un sur un sous-sol de graviers et l’autre sur une couche argileuse.
Estimation de la densité des éléments grossiers
La densité apparente d’un sol varie de 1,0 à 1,6 g/cm3. Les cailloux ont une densité globalement comprise entre 2 et 3. La proportion de cailloux intervient donc directement sur les conseils ou les résultats d’analyses utilisant la densité, par exemple pour les reliquats azotés en grandes cultures. Pour des études précises, notamment en horticulture et maraîchage ou en cas d’irrigation fertilisante, il sera nécessaire d’avoir une estimation de la charge en cailloux en masse et non plus seulement en volume, pour estimer cette densité.
Nature des éléments grossiers et comportement vis-à-vis de l’eau
Généralement, les éléments grossiers diminuent le potentiel hydrique du sol et limitent, en proportion de leur présence en volume, la réserve en eau, du fait de leur absence de porosité. Il y a, par contre, des exceptions, comme les craies ou des grès altérés qui possèdent une porosité parfois importante et « stockent » de l’eau. Dans les régions concernées (Vallée du Rhône, Champagne…), les Réserves Utiles d’un sol caillouteux peuvent être plus élevées que celles des sols non caillouteux. Certaines études ont enfin pu montrer que les cailloux poreux pouvaient jouer un rôle « tampon » en restituant de l’eau dans les phases de dessiccation du sol (Coutadeur et al, 2000). La connaissance de la nature des cailloux présents dans un sol est donc également nécessaire à l’agronome.
Autres informations utiles :
Le niveau d’évolution des cailloux, leur forme, leur dureté, la présence d’éclats coupants, leur sensibilité au gel, leur localisation en surface et en profondeur sont également des informations à collecter, pour une nouvelle parcelle ou l’implantation d’une culture de longue durée.
On voit que l’étude des éléments grossiers du sol est à la frontière entre l’agronomie, la pédologie et la géologie.
1) La « terre fine » est obtenue par séchage de l’échantillon, à l’air libre ou à basse température, puis tamisage à 2 mm. L’objectif est d’émietter les agrégats et d’obtenir une poudre homogène, correspondant à une sorte d’état standard, sur laquelle sont réalisées les différentes déterminations analytiques (lesquelles concernent donc la terre fine séchée à l’air). La « terre fine » ainsi obtenue est un « mélange statistique » qui gomme les hétérogénéités internes à l’horizon considéré et où les constituants du « fond matriciel » dominent en général largement sur ceux des « traits pédologiques ». Source : Guide des analyses en pédologie (D Baize, 2000).