Les besoins en oligo-éléments

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Point sur les éléments minéraux nécessaires à la plante cultivée : approche fonctionnelle des oligo-éléments

Les végétaux chlorophylliens sont supérieurs à l’homme à de nombreux points de vue. Sans parler de leurs exceptionnelles adaptations à l’économie d’énergie, les plantes ont la capacité de produire des substances organiques à partir de composés minéraux, grâce à la photosynthèse. Cette nature de producteurs primaires, ou autotrophes les distingue de l’homme, des animaux et de nombreux micro-organismes qui ont besoin d’un apport externe d’aliments organiques. Chez les animaux, les aliments sont à la fois des matériaux de construction de leur propre matière et leur unique source d’énergie. Chez les végétaux chlorophylliens, par contre, les aliments puisés dans le milieu extérieur sont des matériaux de construction mais ne constituent pas directement leur source d’énergie.


  • Qui est indispensable ?

Pour le physiologiste, trois critères sont nécessaires pour qu’un élément minéral soit dit indispensable à la plante (Arnon et Stout 1939) :

- une déficience de l’élément considéré ne permet pas à la plante d’accomplir un cycle complet (végétatif et reproductif),

- la déficience de cet élément et les symptômes spécifiques correspondants ne peuvent être corrigés que par l’apport de l’élément en question,

- cet élément est directement impliqué dans la nutrition de la plante, indépendamment d’un effet possible sur les conditions chimiques ou microbiologiques dans le sol ou le milieu. Comme pour toute règle, ces critères sont souvent considérés comme trop rigide. Pour quelques espèces, le vanadium, par exemple, peut se substituer complètement au molybdène. Le tableau 1 liste les éléments minéraux actuellement connus pour être indispensables à la plante supérieure.


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Le Chlore est l’élément le plus récemment ajouté à la liste des éléments minéraux indispensables à toutes les plantes supérieures (Broyer end and al. 1954). Le sodium et le silicium ne sont pas indispensables à toutes les plantes et ne font donc pas partie de la liste « officielle » mais sont nécessaires, respectivement, pour les plantes de type photosynthétique C4 (maïs, sorgho, canne à sucre) et pour le riz. Le cobalt est à la frontière entre le monde animal et végétal puisqu’il est nécessaire à la bactérie Rhizobium, présente dans les nodosités des racines de légumineuse et permettant l’assimilation d’azote gazeux. Les travaux sur la rhizosphère et sur les échanges entre la plante et les micro-organismes vont certainement faire encore évoluer ce classement.

Un élément minéral peut ne pas être indispensable, en tant que tel, au végétal, mais lui apporter un effet positif. Par exemple, BOLLARD et BUTLER (1966) ont montré que le rendement des betteraves pouvait être augmenté par apport de sodium. Des apports de silice peuvent avoir un effet intéressant pour certaines espèces, notamment en termes de résistance aux stress climatiques, mais on est alors plus sur un effet mécanique que strictement nutritionnel.

En cultures fourragères ou alimentaires, il peut être intéressant d’apporter à la plante des éléments nécessaires à l’animal qui les trouve ainsi dans sa ration. Des teneurs suffisantes (mais sans excès) en iode, sélénium ou fluor peuvent être des critères de qualité d’un fourrage, mais sans que ces éléments ne soient nécessaires au végétal.


  • Macro ou micro ?

Les éléments minéraux sont généralement classés en macro-éléments dont la plante a besoin en forte quantité et en micro-éléments (voir tableau 1). Ces derniers sont appelés oligo-éléments en France (Bertrand, 1903) et autrefois éléments traces. Cette approche quantitative n’a pas de sens physiologique ; pour la plante, c’est toujours l’élément déficient qui aura le plus d’importance. Cela explique pourquoi la classification en élément mineur ou majeur n’est plus utilisée. Par ailleurs, ces besoins vont varier considérablement d’une espèce à l’autre et la frontière entre macro et micro éléments n’est pas d’une grande évidence (Y. COIC et M. COPPENET 1989). Ainsi, dans l’exemple du tableau 2, les écarts des besoins relatifs entre le fer et le molybdène sont plus élevés qu’entre le phosphore et le fer.

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  • Classement fonctionnel

Le physiologiste préfère des classements basés sur le comportement biochimique et physiologique de l’élément minéral, plus adapté à une vision dynamique de la nutrition. J. NICHOLAS (1961) raisonne sur les notions d’élément fonctionnel ou physiologique. C’est ce que proposent également K. MENGEL et E.A. KIRKBY (1987) dans le tableau 3 en regroupant les éléments par identité de comportement biochimique.

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  • Groupes fonctionnels

En prolongement du classement fonctionnel des éléments minéraux, une autre approche consiste à regrouper les éléments minéraux qui interviennent sur les mêmes fonctions et à inverser la démarche en partant d’une observation de terrain. Par exemple, face à un végétal chlorosé montrant un trouble de la photosynthèse d’ordre minéral, il est intéressant de réfléchir aux éléments minéraux impliqués directement dans la photosynthèse : l’azote, le soufre, le magnésium, le fer, le manganèse, le potassium et le zinc. Ces éléments constituent le groupe fonctionnel « photosynthèse ». En effet, en nutrition, un élément minéral n’est jamais indépendant des autres. Par exemple, corriger un manque de fer par des apports spécifiques sur un végétal en le laissant manquer d’azote ou de magnésium aura très peu d’impact.


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De même, dans les problèmes de coulures ou de chutes physiologiques en plantes pérennes, il est toujours tentant de penser directement au bore ou au zinc, alors que l’azote (en manque, en excès ou en déséquilibre avec le potassium), le phosphore (dans son équilibre avec l’azote) ou le calcium sont, dans la majorité des cas, beaucoup plus explicatifs des problèmes observés. Il en est de même pour les problèmes physiologiques liés au calcium (pommes, melons, pommes de terre…) où le zinc, le bore (en déficit ou en excès) ou des excès de potassium, magnésium ou azote ne permettront pas au calcium, même s’il est potentiellement présent, de structurer les cellules des organes.

En parallèle de cette approche, et avant toute action, il sera nécessaire également de réfléchir aux origines réelles du problème observé : déficit, déséquilibres ou blocages au sol, évènements climatiques, difficultés radiculaires, déséquilibre végétatif…. Le problème est-il évènementiel ou récurrent ? Après ces étapes et avec l’aide des différentes sources d’informations disponibles (observations du végétal, résultats techniques, informations parcellaires, analyse de sol et de végétal…), l’agronome pourra alors proposer des solutions à court terme (apport spécifique) et à moyen terme (amélioration des conditions de milieu).