Le chaulage

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Les amendements minéraux basiques

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  • L’état d’acidité des sols : variabilité horizontale et verticale

Les sols sont issus de phénomènes complexes, leurs caractéristiques physiques et chimiques dépendant de l’origine du sous-sol et des antécédents climatiques. L’acidité d’un sol est fortement influencée par la nature de la roche mère ; les granits bretons sont par exemple responsables de la formation de terrains acides, alors que le calcaire et la craie de la Champagne donnent des sols basiques (cf. carte de France des pH). Le climat et les pratiques culturales vont également avoir une action sur le statut acido-basique d’un sol, une parcelle cultivée ayant une tendance naturelle à l’acidification. Le pH eau (1) d’un sol peut être le principal facteur limitant dans un système de culture : risque de toxicité aluminique et/ou manganique, vie biologique ralentie, problèmes de structure dans les terres limoneuses, blocage des oligo-éléments, … L’utilisation d’amendements minéraux basiques (chaulage) permet d’intervenir sur le pH eau pour le maintenir dans une fourchette comprise entre 5,6 et 6,5. Les préconisations d’apport de ces produits dépendent des systèmes de culture et du statut acido-basique du sol (besoin en bases).

  • Calcul du besoin en bases

Le besoin en bases dépend de plusieurs facteurs, et nécessite une analyse de terre récente :

        -le pH eau et le taux de saturation S/CEC (2) permettent de choisir la stratégie à adopter (redressement ou entretien) en fonction de l’optimum agronomique visé ;       

       - le calcul du redressement se fait en prenant en compte le pouvoir tampon du sol, estimé par la mesure de la Capacité d’Echange Cationique (CEC), afin de ramener le sol à la valeur de S/CEC à l’optimum agronomique ;       

       - la stratégie et les formules de calcul dépendent d'un certain nombre de scénarios (cas général, prairies, systèmes betteraviers et endiviers, …) mis au point par le groupe « Chaulage » du Comité Français d’Etude et de Développement de la Fertilisation Raisonnée (COMIFER) (3)

       - Les apports de redressement peuvent être fractionnés, mais il faut veiller à apporter malgré tout une quantité significative d'amendement basique, surtout si le pH eau est inférieur à 5,5 : à dose trop faible, l'action de l'amendement ne sera pas suffisant, en particulier si le pouvoir tampon du sol est élevé.


  • Amendement minéral basique

Les amendements minéraux basiques doivent répondre à la norme NF U44-001 pour pouvoir être mis sur le marché. Il existe 6 classes, en fonction de l’origine et de la composition de l’amendement. Tous les produits ne rentrant pas dans le cadre de cette norme doivent avoir une homologation spécifique demandée par le fabricant. On peut également citer des produits répondant à d'autres normalisations ou réglementations, comme les boues chaulées, les composts ou fumiers de champignonnière, ...

Il existe un certain nombre d’éléments de marquage obligatoire, selon la classe du produit. En voici quelques-uns :

• teneurs en CaO et MgO

• humidité

• valeur neutralisante

• finesse de mouture

• solubilité carbonique


  • Choix de l’amendement

Le choix de l’amendement se fait en fonction des caractéristiques de la parcelle (CEC, pH eau, ...) et de la rapidité d’effet recherchée : par exemple, si le pH eau est inférieur à 5,5, il est important de le remonter rapidement pour s’affranchir du risque de toxicité aluminique.

Plus le pH eau de la parcelle est élevé, plus il faut choisir un amendement réactif : en effet, le lessivage en CaO est important lorsque le pH du sol est proche de la neutralité. Il faut donc tenir compte de ce lessivage et pallier la perte de chaux lors de l’apport. De même, plus un produit est fin, plus il réagit rapidement avec le sol. Et son action est d’autant plus efficace qu’il est réparti de façon régulière dans le sol. Parmi les facteurs indépendants du produit lui-même, on comprend que la qualité de l’épandage a aussi des conséquences non négligeables sur son efficacité.

Les indicateurs de marquage obligatoire de la norme NF U44-001 sont là pour nous aider dans le choix des amendements basiques.

- Teneurs en CaO et MgO : la concentration en calcium et en magnésium est le premier critère de choix d’un amendement. Toutefois, ce n’est pas parce qu’un produit contient du calcium et /ou du magnésium qu’il a une action neutralisante. Le plâtre, le gypse, le sulfate de magnésie par exemple n’agissent pas ou très peu sur le niveau du pH du sol. Ces produits sont des sels d’acides forts et contiennent un radical acide qui va contrecarrer leur action alcalinisante.

- D’où la notion de valeur neutralisante (VN) ; celle-ci est mesurée selon la norme NF U44-173. La méthode consiste en la détermination de la quantité de produit nécessaire à la neutralisation d’un acide (acide chlorhydrique) exprimée en quantité équivalente d’oxyde de calcium CaO. Ce critère permet de classe r les différents produits en fonction de leur potentiel de neutralisation mais ne renseigne pas sur la rapidité d’action sur le sol. Dans le cas des produits cuits, la dénomination seule permet de préjuger de la rapidité d’action. Les chaux vives ont une action rapide. Pour les amendements crus, la rapidité d’action dépend de l’origine et de la finesse de broyage de la roche. Une craie ou un marbre peuvent avoir des valeurs neutralisantes voisines mais des rapidités d’action très différentes.

- La solubilité carbonique : en mesurant la vitesse d’attaque du produit par un acide faible (solution saturée en gaz carbonique selon la norme NF U44-174), on simule le comportement du produit une fois incorporé au sol. Plus le produit a une solubilité carbonique élevée, plus sa rapidité d’action est importante.

- La finesse : elle est une indication obligatoire dans le cas des calcaires. Plus le produit est fin, plus il permet un contact intime avec les particules de terre. La finesse conditionne donc la rapidité d’action.

D’autre part, certains fournisseurs peuvent utiliser un référentiel commun pour comparer les amendements minéraux basiques. A chaque produit est associé un indice, appelé IPA(4), dont l’échelle varie de 40 à 150. L’amendement adapté à chaque situation agronomique est déterminé en fonction de son IPA et de l’objectif de saturation de la CEC du sol.

L’analyse de terre est un outil de diagnostic incontournable du statut acido-basique des parcelles agricoles. Le LCA vous propose ces analyses de terre avec ou sans interprétation des résultats. Dans le cas des analyses interprétées, nous avons intégré les dernières avancées en matière de raisonnement du chaulage.

Le calcium

Le calcium occupe une place très particulière dans « l’imaginaire » agronomique. Son rôle fondamental dans le modèle classique du fonctionnement du sol (pH, complexe argilo-humique, structure, vie microbienne…) fait souvent oublier que le calcium est également un élément indispensable à la vie des végétaux cultivés. Avoir un pH « correct » dans un sol ne signifie pas forcément que la disponibilité du calcium y soit suffisante pour la nutrition.

  • Le calcium participe à trois fonctions fondamentales :

        - structurale : il participe à la croissance et à la résistance physique des organes en intervenant dans la composition et la capacité d’élongation des parois cellulaires,

        - électro-chimique : complexation de certains déchets cellulaires, régulation de la perméabilité des cellules,

        - catalytique : lien avec les hormones auxiniques, composition d’enzymes …

Il est curieux de constater que beaucoup de tableaux de fertilisation oublient les besoins annuels en calcium alors qu’ils sont souvent équivalents, voire supérieurs, à ceux de l’azote. Dans la composition globale d’un végétal, le calcium est plus présent que le potassium. Il ne s’agit surtout pas de l’inclure systématiquement dans la fertilisation annuelle, mais il est nécessaire de se demander si le calcium est suffisamment disponible dans le sol.


L’analyse de sol va donner une première réponse (niveau en CaO échangeable, pourcentage de calcium fixé sur la CEC, équilibre du calcium vis à vis du potassium, magnésium et sodium, état organique…). L’interprétation va aussi tenir compte de la texture du sol en termes de porosité. En effet, tout manque d’oxygène (compactage, tassements, saturation en eau…) va limiter l’assimilabilité du calcium. Il peut arriver ainsi, dans certains cas, d’être obligé d’apporter du calcium sous forme très soluble en sol basique, voire chlorosant (avec, dans ce cas, certaines précautions) ; c’est une pratique assez courante en pomiculture par exemple. Plus la croissance du végétal est forte ou plus le végétal est vigoureux, et plus les besoins en calcium sont élevés. On observe ainsi souvent, sur céréales, une crise calcique. Ce stress est provoqué par des conditions climatiques très poussantes ou un excès de disponibilité en azote ; cela conduit à une « sur-assimilation » azotée, alors que les prélèvements du calcium sont plus difficiles et contrôlés.


Le rapport N / Ca est à la base de la nutrition végétale. Par ailleurs, tout excès de potassium, magnésium ou sodium (par présence au sol ou apport) va pénaliser l’assimilation du calcium. Ainsi, en sol à faible disponibilité calcique, des excès de fertilisation en K2O ou MgO vont être facilement pénalisants, surtout si les épandages sont positionnés trop proches des périodes de forts prélèvements en calcium. En dehors des désordres bien identifiés (bitter-pit sur pommes, coulures accentuées en vigne, cœur brun de la pomme de terre, pourriture apicale de la tomate…), le manque de calcium peut, plus insidieusement, être un facteur limitant de la croissance.

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Des indicateurs tels que le pH et/ou le ratio Ca/CEC nous permettent de vérifier que nous avons des conditions agronomiques correctes, mais l’idéal pour le sol ne correspond pas toujours aux conditions idéales de fonctionnement du végétal. Si le sol n’est pas à même d’assurer la nutrition en calcium du végétal, ou s’il n’y a pas d’entretien calcique régulier, des amendements calciques sont à apporter au sol. Les produits à utiliser vont se caractériser par leur solubilité élevée : sulfates de calcium (plâtre ou gypse), carbonates de calcium à forte solubilité carbonique, lithothamne.


Légende

(1) pH eau : pH d’une suspension de terre dans de l’eau permettant d’apprécier le pH d’une parcelle au moment du prélèvement

(2) S/CEC : taux de saturation de la Capacité d’Echange Cationique (CEC) par les cations (K+, Mg2+, Na2+ et Ca2+), le complément quand il est inférieur à 100 étant occupé par des protons H+

(3) Le Comifer Chaulage a édité en 2010 une seconde version de sa brochure « Le Chaulage, des bases pour le raisonner »

(4) IPA : Indice de Positionnement Agronomique, mis au point par l’UNIFA (Union des Industries de l Fertilisation), est un outil d’harmonisation dépendant des caractéristiques suivantes du produit :

- nature : carbonate dans les calcaires et dolomies, oxyde ou hydroxyde dans les chaux, silicate dans les amendements basiques sidérurgiques ;

- composition en pourcentage pour les amendements mixtes ;

- présentation : séché, humide, liquide ;

- pour les carbonates :

> Finesse ;

> Réactivité mesurée par la solubilité carbonique pour les carbonates fins, pulvérisés ou broyés, ou la dureté pour les carbonates grossiers concassés.