De la carence à la toxicité : les plages de niveau nutritionnel

De Wiki Auréa
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En pathologie (*), le moment où apparaissent les symptômes est trop souvent considéré comme le début de la maladie, alors qu’il s’agit, dans la majorité des cas, de l’extériorisation d’un processus dont l’origine est antérieure et qui aurait certainement pu être détectée plus tôt avec des techniques appropriées. La maladie commence dès que la première cellule est infectée, mais elle ne se manifeste que lorsque les réactions s’extériorisent.’ Cette remarque générale s’applique entièrement pour les désordres nutritionnels d’origine minérale des végétaux. Cet Agro Reporter présente des clés de détermination des symptômes visuels des plantes, mais en rappelant que les outils existent (analyses de sol, de végétaux…) pour éviter cette « phase ultime » que constitue l’extériorisation.


CONTEXTE

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Tous les agronomes connaissent la loi des accroissements moins que proportionnels, dite loi de Mitscherlich, qui montre que les augmentations de rendement obtenues par des doses croissantes d’un élément fertilisant sont de plus en plus faibles et deviennent même contreproductives. Cette loi s’applique aussi aux autres paramètres de production : vitesse de croissance, vigueur, floribondité, production de matière sèche… Schématiquement, on distingue six zones (voir figure 1) que l’on peut regrouper en 3 vis-à-vis des symptômes et de leur visualisation :

        - une zone (C) de confort nutritionnel pour le paramètre concerné et l’élément minéral considéré.

        - une zone (P) de déficience ou, à l’inverse, de faible toxicité où le paramètre concerné est pénalisé, sans visualisation ; on peut presque parler ici de période d’incubation.

        - une zone (S) de carence ou, à l’inverse, de toxicité où on observe une dégradation importante du paramètre concerné avec des symptômes visuels.


La taille des plages de niveau nutritionnel varie en fonction de l’élément minéral concerné, mais aussi du paramètre de production, de l’espèce, voire de la variété (voir exemple figure 2). Par exemple, la toxicité en bore s’exprime visuellement très rapidement alors que celle du manganèse est beaucoup plus lente à apparaître.

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QUAND INTERVIENT L’ANALYSE ?

L’analyse de sol va informer des conditions de culture et des risques de déficit ou de manque. Cet outil est donc à la base du cursus analytique et explicatif. L’analyse de végétal est fréquemment employée comme outil de détermination ou de confirmation de symptômes (zones S des figures précédentes) ; à ce stade, en dehors d’un intérêt informatif ou d’appropriation des conduites culturales pour les années à venir, la pénalisation ou la dégradation du paramètre de production concerné est déjà très importante et significative sur le rendement ou sa qualité. L’analyse de végétal prend tout son sens quand elle est effectuée dans les autres zones nutritionnelles, soit pour vérifier que la plante se situe bien dans la zone de confort, soit pour améliorer ces conditions nutritionnelles, optimiser les résultats et valoriser le potentiel génétique de la culture.

Les problèmes nutritionnels ont rarement une cause directe. Le cas des excès de cuivre au sol sur céréales est assez illustratif (voir photo) avec une toxicité qui provoque des carences. Elle se traduit par une chlorose plus ou moins généralisée montrant une perte d’activité photosynthétique importante. L’analyse de végétal ne va pas forcément montrer des excès internes de cuivre, mais, toujours, des déficits en fer et manganèse et, par action indirecte, un manque d’azote et/ou de magnésium. L’excès de cuivre au sol limite en effet l’assimilabilité du fer et manganèse. Des apports d’un ou plusieurs des éléments minéraux concernés peuvent limiter l’expression du phénomène et éviter une trop forte dépréciation des résultats. L’analyse du sol va permettre de mettre en évidence l’excès de cuivre au sol et, le plus souvent, proposer une correction durable par l’apport d’amendement basique qui insolubilise le cuivre.


LE DIAGNOSTIC VISUEL

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Nous n’aborderons ici que le cas des symptômes de carence, les expressions de toxicité étant moins spécifiques. D’une façon générale, le désordre nutritionnel se distingue des autres :

- par une logique « géographique » dans la parcelle,

- par une logique de positionnement des symptômes selon l’âge de la feuille (à relier à la mobilité de l’élément minéral concerné),

- par une certaine homogénéité des symptômes sur des organes identiques,

- par une logique agronomique et / ou climatique (la réponse du végétal à une difficulté climatique étant très dépendante de la nature et de l’état du sol),

On distingue les symptômes de chlorose (décoloration des feuilles) qui vont concerner les éléments minéraux intervenant sur la photosynthèse et les symptômes de nécroses (mortalités cellulaires) qui vont plus concerner les éléments de structure (calcium par exemple) ou à fonction électrochimique (potassium).


La figure 3 ci-après présente une démarche de détermination des carences visuelles où seuls les critères peu ou pas dépendants de l’espèce ont été pris en compte.


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Face à un problème ou à une non performance du végétal, il y a bien 4 étapes à suivre :

        1 - déterminer si l’origine est nutritionnelle ; parfois l’analyse va conclure qu’il n’y a pas de piste minérale et, dans ce cas, cela permet d’enlever une hypothèse

        2 - déterminer l’élément minéral (ou les éléments minéraux) concerné(s) : déficitaire, excédentaire ou déséquilibré,         3 - déterminer la cause de ce problème nutritionnel : déficit ou excès direct au sol ou dans les apports, problème climatique, blocage, excès ou manque d’eau, manque d’oxygénation racinaire, parasitisme…

        4 - trouver des solutions techniques pour améliorer la performance du végétal et limiter ou éviter le problème.

Notre service technique est à votre disposition pour répondre à vos questions, échanger sur ces problématiques et construire des démarches de travail.


(*) science qui a pour objet l'étude des maladies et notamment leurs causes et leurs mécanismes